Un prince saoudien veut faire de Sedan un grand acteur du football européen

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Le CS Sedan Ardennes est un club au passé glorieux (2 victoires en Coupe de France, 3ème du championnat de France en 1963 et 1970) qui végète dans le ventre mou du championnat National (3ème division), luttant pour ne pas redescendre en CFA (4ème division). Pourtant, le club est sous le feu des projecteurs depuis qu'une jeune prince saoudien, neveu du roi d'Arabie Saoudite, a déclaré vouloir en faire un pensionnaire de la prestigieuse Ligue des Champions. Avec un mélange de candeur et de détermination, le dénommé Fahd bin Khalid Faisal, qu'il convient d'appeler Prince (comme il faut appeler Albert « Monseigneur » et comme il fallait appeler Bokassa « Excellence ») affiche son ambition pour le club dont la mascotte était le mets favori d'Obélix.

Fahd bin Khalid Faisal n'est pas le premier nobliau de la péninsule arabique ayant décidé d'investir dans le football en Europe : le fameux cheikh Mansour bin Zayed Al-Nahyan, propriétaire de Manchester City, est lui aussi membre d'une famille royale, celle d'Abou Dhabi. Mais pourquoi le jeune prince saoudien a-t-il jeté son dévolu sur l'illustre club des Ardennes, plutôt que sur Marseille, Bordeaux ou Nice ? L'histoire est celle de liens commerciaux entre les frères Gilles et Marc Dubois, propriétaires du CS Sedan, et la famille royale d'Arabie Saoudite. Les frères Dubois, nés dans les Ardennes et grands amateurs de football, sont des entrepreneurs ayant bâti une certaine fortune dans les maisons de retraite et les spas-balnéothérapie. Leur développement les a conduit à travailler avec le royaume saoudien et, comme ils souhaitent faire bénéficier le club de leur cœur de leur success story, ils ont suggéré à leurs partenaires saoudiens d'investir dans le CS Sedan. C'est ainsi qu'un des multiples neveux du roi se trouve en première ligne pour conduire le projet qui doit conduire les rouges et verts du championnat National à la Ligue des Champions, c'est à dire du stade des Herbiers au Camp Nou.

Quelle chance ce projet a-t-il de réussir ? Échaudé par les affaires Ochiai (l'homme d'affaire japonais du Grenoble Foot) ou Mammadov (le repreneur azerbaïdjanais du RC Lens), le monde du football ne cache pas sa perplexité. Les sugar daddies qui injectent du sirop dans les finances des clubs sont souvent des personnages sulfureux ou fantasques : la rentabilité des investissements dans le football reste à démontrer et, souvent, à l'heure des comptes, il ne reste plus que ses yeux pour pleurer. Pourtant, le CS Sedan a quelques atouts. Le club possède une histoire, un palmarès et un stade récent de bonne capacité (23 000 places environ). Les investisseurs misent sur l'internationalisation du club : la proximité de la Belgique, du Luxembourg et de l'Allemagne sont, à leurs yeux, le gage d'un fort potentiel de développement. Cette approche pourrait s'avérer visionnaire : le spectateur (et à plus forte raison le téléspectateur) du football est devenu versatile. A l'exception du socle des fidèles (et en particulier des supporteurs les plus enracinés), le consommateur du spectacle du football semble prêt à s'enthousiasmer pour une équipe composée de joueurs renommés, même si elle est géographiquement lointaine, plutôt que pour une équipe locale constituée d'anonymes.

L'exemple du Paris SG est, à cet égard, significatif. Avant l'arrivée des qataris, le club parisien était moins populaire, en France, que l'Olympique de Marseille ou l'A.S. Saint-Etienne. Depuis que l'équipe est une collection de grands joueurs pratiquant un très bon football (et alignant les victoires), la popularité du club a explosé. Les réserves sur la provenance des ressources du club parisien ont très vite été balayées et des « provinciaux » en viennent à supporter Paris, historiquement honni. En outre, l'inclination pour un club de football est un phénomène susceptible de traverser les frontières. Non seulement des français d'origine portugaise chérissent Benfica ou Porto, mais des citoyens anglais supportent le Borussia Dortmund. Si le flot de ressources est conséquent, Sedan peut devenir un club de premier plan, au cœur -presque- géographique de l'Europe.

Le projet de Fahd bin Khalid Faisal et des frères Dubois est intéressant. Les quelques millions d'euros saoudiens (il est question de 60 millions pour l'ensemble des projets centres de santé, immobilier et football) devraient permettre au club sedanais de rejoindre la Ligue 2 et peut-être même la Ligue 1. Le passage à la dimension supérieure demeure néanmoins très hypothétique : ce ne sont pas 15 millions par an qui sont nécessaires à l'ascension d'un club vers les sommets européens, mais 150 ! Et la facture, déjà rendue salée par l'explosion des droits TV en Premier League, risque de croître encore avec la concurrence nouvelle du marché chinois. La victoire des rouges et verts en Champions League n'est sans doute pas pour cette décennie…

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