Pêche post-Brexit : démonstration de force des pêcheurs français devant Jersey

Par , publié le .

Actualité

Sous la surveillance de deux navires de la Royal Navy, des dizaines de bateaux de pêche français ont protesté dans le calme, jeudi matin devant le port de la capitale de l’île anglo-normande de Jersey, contre les conditions de pêche imposées aux marins français après le Brexit.

Entre 50 et 70 bateaux naviguaient depuis 07H00 sans incident devant le port de Saint-Hélier, a constaté un photographe de l’AFP ayant embarqué dans la nuit sur un bateau normand. Quelques fumigènes ont été allumés en début de matinée.

A quelques miles de là , deux navires de la Royal Navy, le HMS Severn et le HMS Tamar, ont été déployés pour «surveiller la situation», selon un porte-parole du ministère de la Défense britannique, évoquant «une mesure strictement préventive en accord avec le gouvernement de Jersey«.

Ces «manÅ“uvres» britanniques «ne doivent pas nous impressionner», a déclaré à  l’AFP le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes Clément Beaune. Deux patrouilleurs français ont été envoyés non loin, selon les autorités maritimes françaises.

Les pêcheurs français sont eux partis dans la nuit depuis les côtes normandes et bretonnes. «C’est incroyable d’avoir réussi à  réunir tout ce monde-là », s’est réjoui Camille Lécureuil, venu de Carteret (Manche), évoquant «au moins 70 bateaux».

«On ne bloque pas vraiment. On est tous à  l’extérieur du port», a précisé Ludovic Lazaro, pêcheur de Granville (Manche). «Mais le capitaine du port de Jersey ne veut pas laisser sortir le cargo s’il y a du monde dans le coin. Il veut que tout le monde soit parti.»

Selon une source militaire française, «la situation est globalement très calme». «Les consignes de ne pas bloquer l’intérieur du port sont suivies» pour l’instant par les pêcheurs français, a précisé cette source à  l’AFP.

«Pour l’instant, la manifestation a été pacifique», a confirmé Ian Gorst, le ministre des Affaires étrangères de l’île, à  la BBC.

Du côté des autorités de Jersey, on jouait l’apaisement. «La réponse à  ces problèmes est sans aucun doute la discussion et la diplomatie», a souligné le ministre Ian Gorst.

«Un bateau qui pêchait l’année dernière à  Jersey (.) peut pêcher cette année», a assuré un peu plus tôt sur France Inter Gregory Guida, ministre assistant de l’Environnement et des Affaires étrangères de Jersey, qui devait rencontrer une délégation de pêcheurs dans la matinée.

«Ce que nous sommes prêts à  faire, c’est discuter directement avec les pêcheurs. Ils ont tous notre numéro», a-t-il ajouté. Actuellement, les demandes de licences de pêche doivent passer par les gouvernements français et britannique et par la Commission européenne.

«On est passé par une énorme bureaucratie alors que, dans la pratique, on se connaît tous. On s’appelle par nos prénoms. C’est vraiment triste qu’on en soit arrivé là », a regretté M. Guida.

Don Thompson, président de l’Association des pêcheurs de Jersey, a cependant reproché aux pêcheurs français de vouloir «pêcher sans contrainte dans nos eaux, tandis que nos bateaux sont soumis à  toutes sortes de conditions». Il serait «extrêmement injuste» que le gouvernement «capitule devant cela», a-t-il ajouté sur la chaîne ITV.

Mercredi, le président du comité régional des pêches de Normandie Dimitri Rogoff avait assuré qu’il ne s’agissait pas de bloquer Saint-Hélier mais de «marquer le coup». «Le but du jeu c’est de se montrer, de faire voir que les pêcheurs sont déterminés, d’appuyer ce qui a été réclamé», a-t-il déclaré à  l’AFP en évoquant les propos «assez virulents» de la ministre française de la Mer Annick Girardin.

La veille, Mme Girardin, a affirmé que la France était prête à  recourir à  des «mesures de rétorsion» si les autorités britanniques continuaient à  restreindre l’accès des pêcheurs français aux eaux de Jersey, faisant allusion à  des répercussions éventuelles sur le «transport d’électricité par câble sous-marin» qui alimente l’île depuis la France.

Jeudi, Mme Girardin a enfoncé le clou: «je souhaite que les autorités britanniques reviennent sur leur décision» d’assortir de nouvelles restrictions d’accès les licences de pêches délivrées aux pêcheurs français.

Selon Paris, le Royaume-Uni a publié vendredi dernier une liste de 41 navires français, sur 344 demandes, autorisés à  pêcher dans les eaux de Jersey, mais cette liste s’accompagne de nouvelles exigences «qui n’ont pas été concertées, discutées ni notifiées avant» dans le cadre de l’accord sur le Brexit trouvé entre Londres et Bruxelles, en vigueur depuis le 1er janvier dernier.

cor-pau-aag-dab/db/shu

O commentaire

Laisser un commentaire

Votre email ne sera pas publié. Champ obligatoire (*)