Que les rapports de l'Armp ne tombent pas dans le tiroir aux oubliettes

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La délivrance ! L'Autorité de régulation des marchés publics (Armp) a, enfin, rendu public, jeudi passé, le rapport annuel 2017 d'audit de marchés publics et délégations de service public du Sénégal après près d'un an de suspense et d'attente. L'Armp a fini par tenir en haleine toute l'opinion avant la délivrance dans un hôtel de la place. Ces missions de contrôle de conformité ont permis d'appréhender les efforts consentis par les autorités contractantes dans le choix des procédures de passation. Par conséquent, il a été noté une amélioration dans la gouvernance du système de la commande publique. Tant mieux ! En effet, l'Armp, dans ses audits, relève des progrès. D'après son directeur général, Saër Niang, les Autorités contractantes ont fait montre d'un «réel attachement» au respect des règles de passation, à la transparence et la maîtrise des procédures, à l'efficacité dans les acquisitions et à la lutte contre la corruption.

Et au regard de l'évolution du taux des marchés passés par Entente directe de 2008 à 2017,d'importants efforts ont été réalisés. Le taux des ententes directes,qui était de 23% en 2008 et 21% en 2016, est passé à 9% à 2017, soit un taux inférieur au seuil de convergence communautaire (20%), convenu avec le Fmi dans le cadre de l'Instrument de soutien à la politique économique (Ispe).Même si des progrès ont été réalisés par les autorités contractantes, il ne faut pas, cependant, perdre de vue des mauvaises pratiques de quelques élèves récidivistes mentionnés par les audits de l'Armp. Des pratiques qui semblent êtres congénitale chez eux. D'autant que ce sont ces mêmes autorités qui ont été épinglées par d'autres corps de contrôle. On a beau chasser le naturel, il revient toujours au galop. Encore eux. Sans gêne.

Quelques autorités contractantes incorrigibles ont renoué avec leur jeu favori, à savoir dépassement budgétaire, malversation, surfacturation, non respect des règles de procédure de passation, violation des textes du code des marchés… De vieilles pratiques qui ont fini de s'ériger en règles dans la gestion des affaires publiques de certains établissements publics. Et elles sont aux antipodes des principes de bonne gouvernance et remettent en cause l'idée d'asseoir une «gestion sobre et vertueuse», slogan tant claironné sur les toits,au début des années 2012.L'analyse des rapports d'audits réalisés au titre de la gestion 2017 fait ressortir, globalement, les mêmes types de constats que sur la gestion 2016. Il s'agit des lenteurs injustifiées dans la passation et l'exécution de marchés conclus par des modes de passation dérogatoires (Appel d'offre restreint et Entente directe) fondés sur l'urgence ; d'une mauvaise estimation des besoins induisant un recours à des modes de passation inappropriés. Non sans oublier les fractionnements de marchés sans raisons valables, les problèmes d'archivage chez certaines Autorités contractantes, l'absence de tenue de comptabilité matières…

Ces manquements sapent les fondamentaux des finances publiques, érodent inexorablement le peu de ressources financières internes et plongent les caisses de l'Etat dans une situation ambivalente. Certes, c'est une poignée de responsables qui sont dans le viseur du rapport d'audit, mais leurs actes portent un sacré coup à l'image du pays et polluent l'environnement des affaires. C'est également un facteur qui n'encourage guère l'attractivité des investisseurs très regardants sur le système de la commande publique. Ces insuffisances relevées par l'Armp dans les structures de l'Etat sont connues pour être un terreau fertile pour la corruption. Ces rapports, dont leur réalisation a nécessité beaucoup de financements, ne doivent pas passer pertes et profits ; ils ne doivent pas non plus être rangés dans le tiroir aux oubliettes.

Il appartient à l'Etat et à ses différentes juridictions compétentes de prendre le relais de l'Armp pour tirer au clair ces mauvaises pratiques qui ne font qu'anéantir les efforts de l'Etat en matière de promotion de la bonne gouvernance. Je ne protégerai personne». Cette mise en garde du Chef de l'Etat, Macky Sall, ne doit pas être un simple slogan. Les autorités en charge de la commande publique peuvent aussi miser sur la digitalisation, un levier qui pourra contribuer à réduire considérablement les dysfonctionnements dans les procédures de passation. Un plaidoyer réitéré par le Secrétaire général de la Présidence de la République, le 14 novembre 2019, lors du forum sur la commande publique. Mahammad Boun Abdallah Dionne invitait à moderniser l'intervention des organes du système de la commande publique en les orientant davantage vers la dématérialisation des procédures, source d'efficacité, de diligence, de réduction des coûts et surtout de renforcement de la concurrence et de la transparence.

Par Abdou DIAW

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