Cyberpunk 2077 : une enquête accablante relate les mensonges et les mauvaises décisions de CD Projekt RED

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« On a fait The Witcher 3, ça va marcher. »

Habitué à  investiguer sur les conditions de développement des plus grandes productions vidéoludiques, le journaliste Jason Schreier de Bloomberg s’est entretenu avec une vingtaine d’employés ou ex-employés du studio polonais CD Projekt RED afin de comprendre pourquoi Cyberpunk 2077 est passé du rêve au cauchemar, tout en faisant de lui un nouveau cas d’école pour l’industrie du jeu vidéo. Si ce n’est pas une surprise, les développeurs témoignent d’un développement chaotique o๠confiance aveugle et ambition démesurée se sont emmêlées les pinceaux avec des délais impossibles : «Tout le monde au sein du studio savait que le jeu était en mauvais état et avait besoin de plus de temps (.) Un membre de l’équipe a comparé le développement à  la conduite d’un train sur des rails, qui seraient ajoutés au fur et à  mesure (.) Une personne a dit que l’annonce de la date de sortie à  l’E3 2019 était une blague. Ils s’attendaient tous à  ce que le jeu soit prêt en 2022. Les développeurs ont créé des mèmes sur le retard du jeu, en faisant des paris sur le moment o๠il serait vraiment disponible dans le commerce.»

Annoncé en 2012, le développement de Cyberpunk 2077 n’a véritablement commencé que quatre ans plus tard. Contrairement aux affirmations des têtes pensantes de CD Projekt RED pendant de nombreuses années, parlant même d’une vision de créateur, le RPG futuriste ne devait pas proposer une vue à  la première personne à  l’origine, mais bien une vue à  la troisième personne. Pour créer le meilleur jeu de tous les temps et tenter d’égaler les AAA de Rockstar Games (GTA, Red Dead Redemption, Max Payne), la division développement de CD Projekt s’est entouré de nombreux partenaires pour investir massivement dans un nouveau moteur, un nouveau personnel et de nouvelles techniques/technologies. Malgré cela, le studio était en sous-effectif. Les barrières culturelles dues à  l’embauche d’expatriés (sentiment d’être cloisonnés et désorganisés) et plusieurs différends créatifs ont entraîné le départ de plusieurs cadres.

Adrian Jakubiak, ancien programmeur audio de CD Projekt, n’a pas hésité pas à  se confier sur le management toxique initié par la direction alors que celle-ci était de plus en plus dépassée par l’ampleur du projet et ses folles promesses : «Je savais que ça n’allait pas bien se passer. Je ne savais pas à  quel point ce serait désastreux (.) Il y avait des moments o๠j’avais jusqu’à  13 heures de travail par jour »“ un peu plus que mon record probablement »“ et je faisais cinq jours par semaine en travaillant comme ça. J’ai des amis qui ont perdu leur famille à  cause de ce genre de manigances«. Il rajoute également qu’un de ses collègues a demandé, au cours d’une réunion, comment la société pensait pouvoir mener à  bien un projet techniquement plus difficile dans le même délai que celui de The Witcher. Quelqu’un a simplement répondu qu’ils trouveront une solution en cours de route.

La communication de CD Projekt RED a causé la perte de Cyberpunk 2077 dès le début, et notamment à  cause de sa présentation officielle qui était à  la base uniquement pour la presse avant d’être rendue publique suite à  la pression des joueurs impatients : «Les fans et les journalistes ont été séduits par l’ambition et l’ampleur de Cyberpunk 2077. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que la démo était presque entièrement fausse. CD Projekt n’avait pas encore finalisé et codé les systèmes de jeu sous-jacents, ce qui explique pourquoi tant de fonctionnalités, telles que les embuscades en voiture, étaient absentes. Les développeurs ont déclaré qu’ils avaient l’impression que la démo était une perte de temps qui auraient dà» être consacrés à  la réalisation du jeu.»

Adam Badowski, le directeur du studio, a d’ailleurs utilisé son droit de réponse pour apporter quelques réponses à  la communauté : «Il est difficile pour une démo de jeu de ne pas être autre chose qu’une vision ou une maquette, deux ans avant la sortie du jeu, mais cela ne veut pas dire qu’elle est faussée. Comparez la démo avec le jeu. Regardez la scène avec Dumdum ou la poursuite en voiture, ou d’autres choses. Ce que les gens qui lisent votre article ne savent pas, c’est que les jeux ne sont pas faits de manière linéaire et ne commencent à  ressembler au produit final que quelques mois avant la sortie. Si vous regardez la démo aujourd’hui, c’est différent oui, mais c’est tout l’intérêt de la mention »˜work in progress’ dans celle-ci. La version finale de notre dernier jeu est bien plus impressionnante que la démo. Quant aux fonctionnalités manquantes, elles font partie du processus de création. Les fonctions vont et viennent au fur et à  mesure que nous voyons si elles fonctionnent ou non. De plus, les embuscades de voitures existent dans le jeu final et sont presque identiques à  celles de la démo.»

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